L’initiative européenne « Clean Corporate Vehicles » risque de fermer la porte à des solutions énergétiques durables pourtant indispensables
C O L U M N
La fédération sectorielle Energia s’inquiète de l’orientation proposée pour la législation européenne relative aux « Clean Corporate Vehicles[1] ». Au lieu d’adopter une approche technologique exclusive et unilatérale, cette initiative devrait au contraire être technologiquement neutre en incluant toutes les solutions durables qui contribuent à l’atteinte de l’objectif de neutralité carbone d’ici 2050. Nous appelons donc les décideurs à veiller à ce que la législation européenne crée les conditions de marché dans un cadre technologiquement neutres et favorable à l’investissement, afin de maximiser les chances de réussite de la décarbonation du secteur du transport.
L’obligation d’utiliser des véhicules d’entreprise zéro émission (définis exclusivement comme étant des véhicules électriques à batterie ou à hydrogène) ne tient pas compte du potentiel de décarbonation de tous les carburants renouvelables conformes à la directive RED[2]. Un cadre technologique neutre incluant les carburants renouvelables soutiendrait en même temps la décarbonation de la flotte de voitures actuelle et future, complémentaire à l’électrification et préservant la liberté de choix des consommateurs. Le principe de neutralité technologique est repris par la Présidente de la Commission Européenne (Orientations Politiques 2024–2029) et dans le Rapport Draghi. Des prescriptions réglementaires favorisant une seule voie technologique risquent de freiner l’innovation et de retarder la décarbonation du transport.
Nous recommandons donc de mobiliser tout le spectre des carburants renouvelables conformes à la Directive RED[3] pour atteindre l’objectif de véhicules de société propres. Dans le contexte de la prochaine révision du Règlement 2019/631 relatif aux normes d’émissions de CO₂ pour les véhicules, une catégorie spécifique de véhicules « fonctionnant exclusivement avec des carburants neutres en CO₂ (biogènes et synthétiques) » devrait être reconnue comme des véhicules zéro émission. Ces carburants sont adaptés à l’utilisation dans les moteurs à combustion et sont également essentiels à la décarbonation des secteurs difficiles à électrifier, tels que le transport routier de marchandises (notamment sur longues distances) ainsi que l’aviation et le transport maritime.
Les gestionnaires de flottes devraient avoir la liberté de choisir la trajectoire de décarbonation la plus adaptée à leurs besoins opérationnels. Des incitations fiscales peuvent soutenir l’adoption de toutes les technologies à émissions nettes nulles, y compris les carburants renouvelables.
De plus, la législation devrait tenir compte d’une analyse comparative de toutes les alternatives technologiques disponibles à l’aide d’une approche Cycle de vie (Life Cycle Assessment) afin de mesurer l’impact complet réel en CO₂ de tous les types de véhicules. Il serait également souhaitable d’évaluer la cohérence règlementaire de cette initiative avec les autres législations dans le domaine du transport (p.e. RED et ETS2).
Wim De Wulf
Secrétaire général d’ENERGIA
[1] Cadre législatif à venir pour l'accélération des véhicules commerciaux zéro émission
[2] Renewable Energy Directive
[3] RED La réglementation prévoit un mix énergétique diversifié comprenant des biocarburants avancés et des RFNBO (Renewable Fuels from Non-Biological Origin).